Biographie du parrain de la promotion, baptisée le 22 juillet 2017  - Maj du 17/11/2018         
      Promotion E.S.M.  N° 203  “ Général LOUSTAUNAU-LACAU ”   2016 - 2019
Source : www.defense.gouv.fr/terre/actu-terre/nom-de-promotion-du-1er-bataillon-de-st-cyr du 17 nov 2018

Saint-cyrien, héros des deux guerres mondiales, Résistant, fondateur du réseau « Alliance », déporté à Mauthausen et député à l’Assemblée nationale dans les années 50, Georges Loustaunau-Lacau est une figure militaire dont les faits d’armes – croix de guerre 14-18 avec 5 citations et croix de guerre 1939-1945 avec palme – avaient alors justifié le choix des différentes autorités.

Les éléments récemment portés à la connaissance du chef d’état-major de l’armée de Terre, postérieurement à la décision d’attribution du nom, ont mis en lumière l’activité politique de Georges Loustaunau-Lacau dans les années 30, pendant lesquelles il a notamment animé en 1938 une maison d’édition nationaliste, La Spirale, après avoir été mis à pied de l’armée pour des activités anti-communistes. La Spirale a publié deux revues très critiques dans lesquelles ont paru de nombreux articles anti-communistes, antiallemands et antisémites. Il a lui-même écrit au moins un article en 1938 dans lequel il met en doute la loyauté des Français Juifs.

Il est également l’auteur d’un courrier adressé à l’ambassade d’Allemagne en août 1940 et dans lequel, avec des propos antisémites, il propose ses services aux Allemands. L’appréciation du contexte et de la portée de cet écrit reste à mener, Loustaunau-Lacau ayant fondé le réseau de résistance Alliance trois mois plus tard.

Georges Loustaunau-Lacau a par ailleurs été suspecté d’avoir formé avec son réseau anticommuniste la partie militaire de la mouvance d’extrême droite de la Cagoule, suspicions qui ont donné lieu à un procès à la Libération au terme duquel il a été reconnu innocent et réhabilité. Il a été nommé général la veille de son décès en 1955.

Au bilan, ces récentes révélations ont mis en lumière une personnalité contestable, qui, en dépit d’un passé de militaire et de résistant courageux présente plusieurs actes répréhensibles qui ont conduit le chef d’état-major de l’armée de Terre à considérer qu’il n’était pas acceptable qu’une promotion d’officiers-élèves puisse prendre le parcours du général Loustaunau-Lacau comme une référence.

Ainsi, en étroite coordination avec la ministre des armées et le chef d’état-major des armées, il a été décidé de ne plus utiliser ce nom de promotion.

Pour ce faire, un processus a été engagé par l’armée de Terre pour que le nom de cette promotion évolue vers une référence historique incontestable. Cette mesure permettra de nourrir utilement la formation des élèves de cette promotion, dès leur retour de stage à l’étranger. Ceux-ci ne doivent pas être pris en otage de débats historiques qui ne sont pas de leur ressort. Il s’agit donc de concevoir et de mettre en œuvre, avec ces mêmes élèves, un parcours de « mémoire et de vérité » pour les aider à construire le cadre éthique qui devra guider leur vie personnelle et les conditions d’exercice de leur futur métier d’officier.

Enfin, et pour s’assurer que de telles situations ne se reproduisent à l’avenir, le processus de désignation des noms de promotion sera entièrement revu ; il sera opérationnel dès 2019.

Le chef d’état-major de l’armée de Terre est pleinement conscient de la gravité de ce sujet. Il était essentiel d’agir pour le bien des élèves en formation et pour celui de l’institution militaire dans son ensemble. Le processus mené le sera de manière sereine, précise et ordonnée : nous le devons à la jeunesse que nous formons.


Georges Loustaunau-Lacau est né en avril 1894 à Pau. Il intègre Saint-Cyr en 1912, au sein de la promotion Montmirail, promotion qui versera l’un des plus lourds tributs à la Grande Guerre avec 233 de ses 400 élèves morts pour la France. Sous-lieutenant en 1914, d’emblée engagé dans la Guerre, il s’y distingue par son courage et sa détermination dans les rangs du 132e régiment d’infanterie. Il mérite la première de ses cinq citations en assurant seul la liaison avec l’état-major sous un déluge de feu allemand, avant de prendre la tête du détachement chargé de la garde du drapeau de son régiment sur l’Aisne. Pour son courage sous le feu à Reims, à Verdun, et dans la Somme, il est décoré de la Légion d’Honneur à 23 ans.

Le 22 novembre 1918, le capitaine Loustaunau-Lacau a l’honneur de commander la première patrouille qui entre dans Strasbourg, après 48 ans de présence allemande.

Admis à l’école de guerre en 1922, le capitaine Loustaunau-Lacau en sort major. Il rejoint ensuite le Maroc, où il s’illustre une fois de plus au sein de l’état-major du maréchal Pétain pendant la guerre du Rif. Puis c’est la Rhénanie et la Grèce, où il sert comme conseiller militaire. Promu chef de bataillon, il prend le commandement du 24e bataillon de chasseurs alpins en 1932 où il met en application ses théories sur le combat d’infanterie. Il rejoint à nouveau le cabinet du maréchal Pétain.

Au printemps 1940, alors que l’armée française connaît le plus grand désastre de son histoire, il tient tête aux blindés de Rommel sur la Saulx, entre MARNE ET MEUSE dans la région de Vitry le François, détruisant 22 chars allemands avant de s’effondrer, grièvement blessé d’une balle dans le dos.

Fait prisonnier, il parvient à s’évader et rejoint la zone libre. Le commandant Loustaunau-Lacau s’appuie alors à Vichy sur ses contacts d’avant-guerre pour mettre sur pied le réseau de résistance Alliance, qui sera considéré par le général De Gaulle comme l’un des plus efficaces. Ce réseau s’étend dans toute la France et renseigne directement l’Intelligence service britannique. Dès 1941, Loustaunau-Lacau est recherché par les Allemands.
Capturé en 1942, torturé durant six mois durant dans les caves de la Gestapo, il est déporté à Mauthausen au terme de 54 interrogatoires en n’ayant jamais livré la moindre information. Jusque dans les camps, le commandant Loustaunau-Lacau s’affirme comme un chef énergique et un homme de caractère, protégeant ses camarades et n’hésitant pas à parler en leur nom. Il survit par miracle aux marches de la mort et est libéré en avril 1945.

Rentré en France, il se heurte aux sectarismes de l’après-guerre, lui dont l’engagement pour la libération du pays avait toujours été l’unique ligne de conduite.
L’historien Simon Epstein résumera ainsi ce parcours atypique : “ Nombre d’antifascistes de 1936, basculés collaborateurs en 1940 mais experts à se faire pardonner en 1944, auront connu une Libération plus paisible que celle qui s’acharna sur ce résistant de la première heure, rescapé de Mauthausen et des marches de la mort ”.

Il rédige ses Mémoires au titre hautement symbolique de « Mémoires d’un français rebelle » et plusieurs autres ouvrages qui expriment sa pensée riche et ses fortes convictions. Élu député du Béarn en 1951, il siège à l’Assemblée Nationale. Victime d’un malaise le 11 février 1955, alors qu’il vient d’être nommé général de brigade, il meurt chez lui le jour même.

Héros de guerre et ardent patriote, le général Loustaunau-Lacau incarne magnifiquement la droiture, la fidélité à ses idéaux et le service désintéressé de la France. Il eut toujours la force de demeurer, envers et contre tout, dans ses combats comme dans son âme, un Français, libre.

Rédaction et droits : © École Spéciale Militaire de Saint-Cyr 2017